Responsabilisation et la reddition des comptes dans le cadre de la décentralisation financière en République Démocratique du Congo : entre « blame avoiding » et « credit claiming »

SAMUEL BATUMIKE ET ERIC CHAMPAGNE (CENTRE D'ETUDES EN GOUVERNANCE)

L’adoption de Constitution de 2006 par la RDCongo a constitué un véritable tournant décisif dans sa gouvernance politique et financière. Elle marque le début d’un processus de démocratisation et un effort de s’aligner sur les nouvelles perspectives de la mondialisation. L’introduction des instruments de la bonne gouvernance notamment l’institutionnalisation des élections comme d’accession au pouvoir et la décentralisation comme mode de gestion de pouvoir s’inscrit dans cette démarche. Par ces instruments, les provinces et les entités locales recouvrent leur autonomie politique, administrative et financière. Ainsi, responsabiliser les décideurs locaux pour les rendre plus redevables s’érige à une alternative face à l’opacité dans la gestion publique et constitue un moyen de rapprochement entre gouvernants et gouvernés. Par conséquent, il s’agit d’un autre moyen d’ouvrir la boite noire de l’État pour en saisir les mécanismes de mise à l’agenda et de mise en œuvre de politiques publiques dans un contexte de décentralisation.

Après plus de deux décennies, la littérature sur la décentralisation en RDCongo met en exergue une certaine hybridité dans la gouvernance des provinces et des entités locales. Cette situation a-t-elle entaché les mécanismes de responsabilisation et de reddition des comptes? L’hybridation de la réforme n’est-elle pas un moyen d’éviter le blâme et de demeurer en même temps crédible devant ses partenaires politiques et sociaux? Notre étude de cas portant sur la ville de Kinshasa souligne démontre que nombreux facteurs notamment la redistribution de pouvoir et des ressources réduisent les marges de manœuvre des provinces d’exercer leurs responsabilités et d’en rendre compte.